Est-il vrai que l’OMS parle d’addiction au jeux vidéo ?

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             L’OMS, Organisation mondiale de la santé, avait ajouté le trouble du jeu vidéo « gaming disorder » dans la nouvelle version de sa classification internationale. Ce recueil, nommé CIM-11, est une liste des maladies et autres problèmes sanitaires possibles, pour que le monde entier puisse se reposer sur les mêmes diagnostics. L’intérêt de tous se synchroniser autour des mêmes mots répond à un enjeu statistique de pouvoir suivre l’état sanitaire du monde. Au sein de la CIM-11, existe maintenant un diagnostic répertorié comme trouble du jeu vidéo.

Les professionnels de santé peuvent ainsi nommer ce trouble, si une personne en situation de mal-être vient les voir. 

3 points sont à identifier selon ce guide de l’OMSPremièrement, est-ce que la personne perd le contrôle de ses sessions de jeux ? C’est-à-dire qu’elle ne peut plus en contrôler ni la fréquence, ni la durée, ni l’interruption, ni même le contexte dans lequel elle joue. Deuxièmement, est-ce que la priorité donnée au jeu vidéo prime sur toutes les autres activités importantes de sa vie, c’est-à-dire prend le dessus sur les autres activités du quotidien. Et troisièmement, est-ce que la personne continue de jouer même si elle constate et subit  l’augmentation des conséquences négatives sur les domaines de sa vie qui lui paraisse importants. Personnel, familial, social, éducatif, professionnel ou autres domaines.

L’OMS précise ensuite qu’il faut au moins que cela dure depuis 12 mois pour pouvoir faire le diagnostic. Voilà une posture raisonnable, qui ne part pas du principe que le jeu vidéo rend comme ça ou comme ça, mais qui fait en sorte de savoir accueillir les personnes qui demanderaient de l’aide à propos d’un comportement qu’elles ne maitrisent pas. Même si le trouble est inséré dans le chapitre des « addictive behaviours », la catégorie qui collait le mieux, il n’est à aucun moment signifié dans le texte concernant le jeu vidéo, ni le mot addiction, ni le mot dépendance, mais simplement le mot trouble. Cela vaut pour la CIM-11 qui est en anglais mais aussi pour la page dédiée en français sur le site de l’OMS.

On pourrait voir dans ce traitement nuancé, une avancée des mentalités sur la façon de traiter le jeu vidéo et on aurait pu s’attendre à ce que la nouvelle fût accueillie avec satisfaction. Ce ne fut pas le cas, à cause de deux biais. D’une part la méfiance des joueurs concernant l’image que donne la société au jeu vidéo, à cause des rejets successifs au fil de l’histoire qu’effectivement ce divertissement a subi. D’autre part, la réseau-socialisation de l’information qui fait qu’on tweet ou publie sur les sites d’info gratuits, plus vite qu’on ne lit réellement le texte qu’on va commenter. Pour des raisons structurelles d’audience en partie.

Ce déficit de confiance des joueurs, associé à ce déficit de travail d’information, fait que tout le monde n’a retenu que le nom du chapitre en anglais. Alors, quand aujourd’hui on apprend que l’OMS recommande l’utilisation de jeu vidéo pendant le confinement, beaucoup pense que l’OMS retournerait sa veste en recommandant quelque chose qu’elle qualifiait jadis d’addictif. Or contrairement à ce que laissent penser plusieurs titres racoleurs, l’OMS n’a pas dit que le jeu vidéo rendait addictif.  Il a mis un mot sur des demandes de prise en charge, qui existait déjà avant la classification, pour formaliser le diagnostic au niveau mondial dans le but d’aider les personnes qui sollicitent de l’aide. Il a formalisé ça avec nuance et retenue. Cela ne veut pas dire qu’il ne conseille pas le jeu vidéo pour autant.

Ce n’est pas parce que l’OMS explique qu’il existe des troubles du sommeil, qu’il vous déconseille de dormir.

Rémi Abida, Psychologue à Rennes et en ligne sur Discord.

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