La motivation au travail

Augmenter la motivation au travail, voilà un sujet bloqué dans un curieux paradoxe. Car plus on cherche à compenser un déficit de motivation chez un travailleur, par des rétributions externes, comme des primes ou des notes, et plus on fragilise sa motivation interne, pour ce travail. Cet article est proposé par le psychologue à Rennes Rémi Abida.

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Que savoir sur la motivation au travail

Le Livre de Daniel Pink La vérité sur ce qui nous motive commence, par une étude de 1949 montrant que la motivation des macaques rhésus ne tenait pas seulement soit aux motivations biologiques, soit aux motivations externes (récompenses / punitions). Les singes montraient au contraire, un intérêt pour un exercice de casse-tête sans enjeux, dans lequel il fallait réussir à soulever une petite charnière en métal, bloquée par une tige et un crochet. Une théorie d’un troisième type de motivation naissait alors : les singes ont résolu les problèmes uniquement parce qu’ils trouvaient gratifiant de les résoudre. La réussite de la tâche a en soi constituait une récompense intrinsèque. Et là où les choses devenaient sérieuses, c’est que l’étude découvrit qu’ajouter une récompense à la réussite de ce casse-tête faisait chuter les performances et l’intérêt que montraient les singes. En les payants en nourriture, on détériorait leur motivation intrinsèque. Probablement qu’on altérait le sens, la signification de l’exercice. Des résultats confirmés au fil du temps sur des humains, avec différentes tâches à accomplir.

Pour résumer : il existerait 3 sources de motivation. Motivation biologique (lié à la survie), motivation externe (liée aux récompenses et punitions) et motivation interne (c’est-à-dire le sens que cela a pour moi et qui m’anime). Et lorsque la motivation biologique n’est pas invocable, car déjà résolue, c’est bien la motivation interne qui est efficace. Car la motivation externe, la carotte et le bâton, n’est pas une motivation de grande qualité. Et serait même contre-productive selon les circonstances.

La motivation externe étoufferait la motivation interne, réduirait la performance, limiterait la créativité, encouragerait la vision à court terme et les solutions peu morales. La carotte et le bâton ne montreraient des résultats d’amélioration de la performance que sur des tâches routinières et non créatives, où il y a peu de motivation interne à abimer. En gros, au travail, si la carotte et le bâton ont des effets visibles sur les comportements, il est naïf de croire que ces effets sont de l’ordre de la motivation réelle de la personne. Les récompenses peuvent conditionner le passage à l’action, sans motivation interne pour autant.
Mais si la motivation dite intrinsèque (de satisfaction intérieure) est plus efficace que la motivation dite extrinsèque (bénéfices extérieurs), comment permettre alors aux personnes de développer plutôt la motivation intrinsèque, au travail ? Trois éléments nous dit l’auteur : Autonomie, maîtrise et finalité.

De quoi envisager les problématiques de motivation au travail différemment. 1. Sous l’angle du manque d’autonomie offert par l’activité 2. Sous l’angle de la maîtrise du travailleur (le mettre dans des situations où la difficulté est adaptée) et 3. Sous l’angle de la finalité (à quoi je sers, puis je sentir la finalité et cela est-il utile au fond). Le livre insiste sur le fait que la finalité est ce que l’entreprise a le plus de mal à faire émerger et ce qui fait que les réflexions sur la motivation au travail se confrontent souvent à un mur, celui de l’organisation du travail elle-même, très fragmentée par tâche. Un travail dans lequel avoir la vision et l’action sur l’ensemble d’une production ou d’un service se raréfie pour les travailleurs. Ce que nous dit ce livre semble logique lorsqu’on y pense. Les études montrent que nous sommes plus performants lorsqu’on fait quelque chose qui a du sens pour nous. Et lorsqu’on est libre de l’envisager à sa façon. Voir les performances chuter lorsqu’on conditionne l’activité à une récompense pourrait alors s’expliquer par le fait qu’on altère précisément le sens que l’individu donne à cette activité. On le force à l’envisager d’une autre façon. De quoi faire baisser la motivation nettement…ou plutôt, de quoi solliciter une autre forme de motivation (extrinsèque) largement moins efficace, voire problématique.

Rémi Abida, Psychologue à Rennes et en ligne. 26 rue Poullain Duparc 35000 Rennes. 0756858708

Contact : remiabida@psyacp.fr